L’interdépendance comme nouveau récit ?
Dans l’une de nos dernières infographies, on parlait des nouveaux récits. Pour nous, c’est à la fois un effet levier pour la transition et un terme vague dont on ne sait pas trop ce qu’il contient. On s’est donc donné pour objectif de faire quelques infographies sur ces fameux nouveaux récits dont celle-ci sur l’interdépendance.
L’indépendance comme récit dominant
Alors pourquoi promouvoir le récit de l’interdépendance ? On ne va pas se mentir, dans l’époque actuelle l’un des récits dominants est « l’indépendance » ! Cela se traduit par tout un tas d’aspects différents :
- l’indépendance de la volonté (« quand on veut on peut », …)
- l’indépendance économique (valorisation de la figure de l’entrepreneur, chômeur qui n’a « qu’à traverser la rue pour trouver du travail », moindre consentement à l’impôt, …)
- ou bien l’indépendance comme objectif d’éducation (« il faut qu’ils apprennent à voler de leur propres ailes », il faut les former à « affronter la vraie vie », …)
- …
L’interdépendance comme récit émergent
Face à cela, construire et valoriser un discours de l’interdépendance nous semble important pour au moins trois raisons :
- Cela nous semble plus prêt de la réalité ! En effet, qui peut sérieusement tenir le discours du « je me suis fait tout·e seul·e » ? Même Elon Musk doit une partie de sa « réussite » à tout un tas d’autres personnes !! Eh oui c’est vrai. Tenez au hasard : à ses parents qui ont pris soin de lui à sa naissance (et surement après aussi), à Alessandro Volta qui a inventé la pile électrique (au passage personne n’a inventé l’électricité, c’est le fruit de découvertes qui s’étalent sur plus de 2600 ans !), aux infrastructures et institutions américaines et mondiales, etc.
- Une fois que l’on a ça en tête, ça amène indéniablement un peu d’humilité. Voilà qui ne fera de mal à personne dans notre époque et qui est un facteur facilitant pour mieux coopérer.
- Enfin et surtout : une fois que j’ai compris que je suis interdépendant·e avec tout ce qui m’entoure, prendre soin des autres et de l’environnement n’est plus vécu comme une privation ou un sacrifice, mais comme un acte naturel qui me bénéficie également. D’ailleurs, et si je stimulais la biodiversité chez moi ?
L’in(ter)dépendance chez les philosophes
Certain·es d’entre vous s’en seront peut-être aperçus, pour cette infographie nous avons puisé des idées chez quelques philosophes bien connus. On détaille ci-dessous lesquels et on vous met des ressources pour aller plus loin. Ils n’ont d’ailleurs pas fini de nous inspirer pour de prochaines infographies 😉
L’indépendance avec Descartes ?
« Je pense donc je suis », mais aussi plus subtilement « maître du monde » qui renvoie à la citation “se rendre comme maîtres et possesseurs de la nature”, la partie « indépendance » de notre infographie fait un gros clin d’œil à… Descartes.
Alors Descartes est-il la cause de notre sentiment actuel d’indépendance ? Pas si simple 🙂 Il faut replacer son discours dans son contexte. Descartes a une réelle volonté d’indépendance notamment vis à vis de la nature. Et à l’époque c’est extrêmement libérateur. Mais ne sommes-nous pas allé trop loin dans ce détachement du monde ?
Alors on vous conseille ce podcast d’une heure analysant cette fameuse phrase « Se rendre comme maîtres et possesseurs de la nature« .
L’interdépendance avec Spinoza ?
La partie « interdépendance » de notre infographie fait, elle, un clin d’œil à Spinoza. « L’humanité n’est pas un empire dans un empire » renvoie à la citation “l’homme n’est pas un empire dans un empire”.
Alors Spinoza est-il le chantre de l’interdépendance et des relations harmonieuses ? Pas si simple 🙂 Mais il apporte quelques réponses si nous pensons être allé trop loin dans le détachement vis à vis du monde.
« [Pour Spinoza] l’homme n’est qu’une modalité parmi bien d’autres de la nature. Ça ne signifie pas qu’il n’est qu’impuissance, mais que ce qu’il fait, c’est en interactions. » comme le dit très bien Pascal Severac dans ce podcast que nous vous conseillons également 😀
Vers un nouveau rapport au monde avec Baptiste Morizot ?
Quand on parle de « Je fais partie d’un tout : le vivant » dans la partie « Interdépendance » de notre infographie, nous faisons cette fois-ci un petit clin d’œil à un philosophe contemporain : Baptiste Morizot.
En effet, le dualisme nature/humain (ou nature/culture) est tellement ancré désormais (en partie à la suite de Descartes) qu’il est intéressant de présenter les choses différemment. C’est ce que propose Baptiste Morizot avec le terme de « vivant ». Autant vous le dire, ça nous parle vraiment et on y reviendra surement dans une autre infographie. On vous laisse donc méditer avec cette citation et on précise ça bientôt 🙂
« Que devient « protéger la nature » quand on a compris que le mot « nature » nous a embarqués dans une impasse dualiste, et que protéger était une conception paternaliste […] ? Cela devient « raviver les braises du vivant » »
— Jeff des écoloHumanistes (@Jeff_eH_) April 21, 2021
Baptiste Morizot#1citationphiloparjouren2021
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