Du développement durable à l’écologie humaniste
Pour marquer les 10 ans du site internet, nous nous sommes repenchés sur la définition écolohumaniste !
Pour rappel, au début de notre aventure, en 2014, nous somme partis d’une critique du développement durable. En effet, le DD place ses 3 piliers sur un même niveau : environnement, social et économie. Le développement durable serait alors l’intersection de ces 3 sphères. En réalité, c’est surtout une manière de faire de l’économie sur fond de socialo-greenwashing.
Pour nous, il y avait donc une hiérarchie entre ces 3 sphères. L’environnement est une nécessité (la maison dans laquelle on vit et dont on doit prendre soin), l’humain est notre objectif (le but : être heureux), l’économie doit redevenir un moyen.
Une nouvelle définition écolohumaniste moins centrée sur l’humain ?
Cette définition nous a suivis pendant 10 ans, pourtant elle nous correspondait de moins en moins. Nous n’étions plus très à l’aise avec elle, principalement car elle était très « humain dans son environnement ». Cela crée une séparation entre l’être humain et la « nature ». Nous pouvons résumer notre inconfort en une citation :
« Que devient protéger la nature, quand on aura saisi que la nature était une invention dualiste qui a contribué à la destruction de nos milieux de vie, et que protéger était une conception paternaliste de nos rapports aux vivants ? »
Baptiste Morizot, Raviver les braises du vivant
Ce questionnement sur notre rapport au monde a donc été alimenté par les écrits de Morizot. Mais aussi pêle-mêle, par :
- Philippe Descola et sa critique du dualisme nature/culture
- Bruno Latour et son invitation à penser Gaïa
- Vinciane Despret et son rapport au vivant non-humain
- nos infographies sur l’interdépendance et sur les nouveaux récits
- notre lecture de Spinoza et nos rencontres avec des spécialistes : Marion Blancher, Marine Bedon…
- et tant d’autres…
Toutes ces lectures, ces échanges, ces films, ces podcats nous ont convaincus que les êtres humains n’étaient pas un animal à part… OK mais à partir de là, quelle est la nouvelle définition écolohumaniste ?
Voici quelques tentatives dont nous n’étions pas tout à fait contents :
- Prendre soin des êtres humains en tenant compte de nos interdépendances aux autres vivants
- « Anthropocentrée (s’intéressant en priorité à l’existence humaine et sa réussite) sans être anthropocentrique (ne faisant pas pour autant de l’humain le centre du monde) ». – Extrait de la thèse de Marine Bedon sur Arne Naess, Spinoza et la deep ecology
- L’objectif reste l’épanouissement de chacun·e, ancré·e dans ce tissu relationnel d’interdépendance entre vivants
- Continuer à viser l’épanouissement des êtres humains, tout en étant conscient·e que nous ne sommes « que » des vivants parmi les vivants
- Participer à la construction d’un chemin qui place l’humain parmi les vivants, au cœur d’un réseau d’interdépendance, tout en favorisant l’expression de notre puissance d’agir, de notre joie
- Comprendre, simplifier et transmettre pour que chacun·e puissent s’épanouir dans ce tissu d’interdépendance entre vivants
Pas évident 🙂
La nouvelle définition écolohumaniste ?!
Face à cette indécision, une rencontre et une discussion a été importante, avec Mélanie Trouessin. Elle est docteure en philosophie et anime des ateliers philo sur la transition écologique. Nous nous sommes rendus compte en discutant avec elle que toute la tension, et la difficulté, se tenait dans la volonté de se considérer comme vivants parmi les vivants, tout en étant à la fois des êtres humains. Une fois clarifié ce point, nous l’avons donc écrite et voici notre nouvelle définition, ou raison d’être :
- Notre rapport au monde : Les humains sont des vivants parmi les vivants.
- L’objectif : Tendre vers un monde plus épanoui.
- Notre point de vue : Celui d’êtres humains.
Alors que signifie cette définition ? Qu’est-ce que viser l’épanouissement de toutes & tous, humains et non-humains ? Cela signifie-t-il de tout sanctuariser ? De ne rien détruire, utiliser… ? Non pas du tout. Cela permet d’être au clair sur ce que l’on est, un animal interdépendant avec les non-humains. Et notre point de vue ? Nous parlons en tant que membres de l’espèce humaine, pas à la place des animaux ou des végétaux. Baptiste Morizot parle d’avoir des « égards ajustés » et ça nous semble tout à fait pertinent.
Puisqu’on le cite au début et à la fin de cet article, voici 7 minutes de cadeau en vidéo. Il y aborde justement tous les questionnements liés à notre redéfinition.
Si vous avez un poil plus de temps, on vous conseille de nouveau la thèse de Marine Bedon : Arne Næss, Spinoza et la deep ecology : vers une éthique de l’enrichissement de l’expérience. Une lecture très nourrissante 😉
Bon visionnage, bonnes lectures et bonnes réflexions. Nous continuerons à les alimenter avec comme objectif, à travers tout ce que nous faisons : comprendre, simplifier, transmettre pour participer à un monde plus épanoui.
Enfin, un dernier point de clarification. Nous avons choisi le terme épanouissement car sa définition nous convient bien. Elle évoque la plénitude, l’harmonie, l’ouverture (dans une époque où l’on vise plutôt le dépassement). Nous parlons d’un monde épanoui car, pour nous, l’épanouissement ne peut pas être individuel (comme le suggère le développement personnel) mais forcément collectif, tenant compte de tout ce qui existe.
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